03/12/2012

        Je vous l'accorde, j'ai connu des instants plus glamour dans ma vie. Cela dit courir en escarpins après le bus (et le rattraper) ne procure pas la même satisfaction que d'admirer un champs de soja entièrement désherbé par soi-même.

La première matinée passée, j'ai rapidement troqué short et tee-shirt contre une panoplie d’épouvantail. Car outre le soleil de plomb menaçant ma tête, il subsiste parmi les plants de haricots toute une faune aussi diversifiée que surprenante.
 Ainsi je finis par partager à mon insu ma botte gauche avec une grenouille. Celle-ci avait du se glisser sous mon pied par goût du risque. Point de scène sanguinolente, n'ayez crainte! Sentant que quelque chose me gênait, je finis mon rang de haricots en boitant, l'appréhension au ventre ("Qu'est-ce que c'est? Ça a l'air mou...et chaud... oh nooon..."). Arrivée à destination je retournai la botte: une petite grenouille en tomba. J'en connais qui aurait hurlé...
Que faire lorsqu'il pleut et qu'il n'y a plus d'oignons à trier...?










On fait des nouilles!



 Cette expérience improvisée fut l'un de mes meilleurs souvenirs. L'atelier avait déjà commencé mais nous allions rattraper notre retard avec le secours des grand-mères qui nous observaient, amusées.
Munie d'un tablier et d'un énorme couteau, je pris place et suivis les consignes de trois vieilles femmes parlant toutes plus fort que les deux autres.
Après une session de pétrissage musclé, il faut couper très finement la pâte à l'aide d'un hachoir digne d'une arme du Cluedo.
 Avec fierté je ramenai à la ferme, mon œuvre dans une boîte et c'est avec lassitude que j'en mangeai les quatre jours suivants.

En tant que bon pédagogue, Mutô san me présenta un matin ma nouvelle (et dernière) tâche. Faire des fétus et les disposer debout afin qu'ils sèchent rapidement. "Mais qu'est-ce que c'est, Mutô san...?" Et fier de lui, mon hôte me répondit: "Soba".
 Pour expliciter, j'avais sous les yeux les tiges du sarrasin qui avait servi à fabriquer la farine que nous avions utilisé pour faire les soba (nouilles de sarrasin). "Ainsi tu connaîtras tout le parcours des soba!"
Chouette, mais je n'en demandais pas tant... Je me demande ce que l'on aurait fait s'il m'avait emmené à un atelier de tricot...

"Pousse pas par-là! Att... Ah non! Ecraaase! (pofpofpof) Yeurk."
Une de plus en moins.Et de quatre adorables bébés mygales grises sauvagement écrasées par d'horribles parisiens en mal de Baygon!!!
"J'irais bien au petit coin mais il y a un énorme truc plein de pattes sur le couvercle des toilettes" ou encore, vous est-il déjà arrivé de prononcer: "J'aimerais ouvrir la fenêtre mais je ne voudrais surtout pas réveiller les araignées..." dès le saut du lit?
Avis à toutes les victimes du machisme , envoyez votre mâle à Kagoshima, il en reviendra maniaque ainsi que parano. "ごちそうさま"* . Dès la fin du repas, l'un saute sur la vaisselle et le second aspire la salle à manger à fond. Ce sont les précautions de base dans cette maison. Sans quoi au bout de dix minutes un raid de fourmis est lancé sur les trois miettes de pain tombées par terre et une colonie de cafards inspecte très sérieusement l'état de votre évier.
NB: Les fourmis sont rouges et minuscules. Les cafards eux, font un bon 6 cm.
NB Bis: Vous ai-je précisé que j'avais une peur phobique des insectes...?

* (Ogojizosama) Formule prononcée à la fin du repas.

"Attends...Chhhht! On dirait que quelqu'un marche en talons aiguilles sur du métal... C'est quoi ce.... Oh p*****!"
Oui, oh p*****, car oh flûte ne serait pas de taille face à cet espèce de rhinocéros qui gambade sur la moustiquaire de la fenêtre. A ce stade, ce n'est même plus un insecte, mais plutôt un vrai animal. Un truc qu'on ne peut écraser sans faire dans le gore. Un "insecte" tellement gros que la peur laisse place à l'intrigue ("Mais... ça vit comment, ça?").
Donc une barre de Mars dotée de 6 pattes, d'antennes de 10 cm et... le tout enrobé d'une une solide carapace à en croire le bruit que ça a fait en tombant sur le sol.
  
Bien sûr je vous passerai l'épilogue sur la sublime couleur vert pomme des "steaks" que j'ai rencontré dans le champs. Il paraît que même au-delà de 10 cm ça s'appelle toujours une sauterelle. J'ai aussi pu observer que malgré ses couleurs très techno parade, la mante religieuse japonaise est toute aussi cruelle.  
Depuis quelques jours j'ai deux piqûres qui curieusement virent au rouge flash (ou sang...?). Je ne préfère pas en connaître l'origine.
Chez moi en France, je bois une tasse d'eau chaude en me levant le matin. Ici je me contente d'un verre d'eau courante depuis que j'ai dérangé deux cafards qui se bécotaient dans la bouilloire.
                                        [...Quelques heures plus tard...]
Bon je viens de me documenter. Je n'aurais pas du. Un cafard, ça peut supporter douze fois la dose mortelle de radiations pour un humain. Ça vit neuf jours sans sa tête. Ça respire 45 minutes sous l'eau. Et pire qu'un fantôme récalcitrant, sa dépouille attire ses congénères complètement surexcités.  


Illustration: http://mihoojapan.blogzine.jp/photos/blogillust/gejigeji.jpg