20/06/2014

Une Tronculite sub-aiguë de la... quoi ??? (Part. I)



          Mon corps a gentiment attendu que je sois bien loin de la France pour se déglinguer, au point de me faire franchir la porte d'une clinique japonaise pour y passer quelques examens. Si j'avais eu à subir cela en terrain connu et conquis dont je maîtrise parfaitement la langue, j'aurais déjà eu la frousse. Mais là, au Japon,  autant vous dire que je flippe à fond les binettes.

Descente de nagashi sômen
    J'entre donc à 09h08 dans un bâtiment tout blanc. Tout d'abord dès le premier tapis on vous demande de retirer vos chaussures (oui comme à la piscine) et de les déposer dans un casier numéroté. Je cherche mon chiffre porte-bonheur.... Zut il est déjà pris. Non pas que je sois superstitieuse, mais dans ces moments-là, mon cerveau est extrêmement perméable et je crois tout signe du destin, plus particulièrement lorsque celui-ci est de mauvaise augure.
J'arrive à l'accueil et présente ma carte de résidente (le sésame) et mon attestation d'assurance en tâchant de garder mon intégrité, droite dans mes savates en pilou d'un blanc immaculé.
 "-えええっとー…少々待ちください." (aloooors... Veuillez patienter un petit moment, svp)
Non. Pas encore. Surtout pas aujourd'hui...

Donc j'attends. On me fait asseoir. Au bout de dix minutes la secrétaire vient me

Le Monop' du coin...
voir et me fait comprendre avec force tournures alambiquées (parce que trèèès polie), qu'ils ne savent pas trop comment fonctionnent mon assurance, ma mutuelle, et surtout mon système de paiement. J'explique que je dois avancer l'argent puis me faire rembourser plus tard. Aucun problème, madame. Vous aurez votre argent aujourd'hui, en cash !
 Me revoici à l'accueil avec un superbe formulaire plein de kanji* à remplir. C'est là que je me dis que les 300 Euros que m'ont coûté mon dictionnaire électronique ont été l'investissement du siècle. Puis de nouveau « 少々待ちください».

Cela fait maintenant quinze minutes que je patiente devant un écran de télé. Les émissions japonaises sont pour moi (et pas que), un mystère. Pourquoi écrivent-ils toujours tout ce qu'il se dit à l'écran ? (Juste en passant, ils sont entrain de diffuser un concours de mangeurs de tartes à L.A. Précision : Les participants ont les mains attachées dans le dos. Ah, toutes mes excuses, ça vient de passer à un concours de culturisme féminin. Ah maintenant c'est la pub.)
J'ai la vague impression que je vais plutôt subir un lavage de cerveau au lieu d'une mammographie.

Les sièges autour de moi sont occupés par des postérieurs de mamies japonaises brushées, permanentées discutant à voix basse. Toutes ont déjà jeté au moins un coup d’œil à la gamine pas bridée qui parle en langage du cru avec les secrétaires médicales. Je me sens comme un clou qui dépasse, comme un peuplier au milieu d'une forêt de bouleaux,  Michael Jordan chez les Oompa Loompa. Bref je ne me sens pas très à mon aise.
Toutes les cinq minutes un haut-parleur appelle des madames Nakagawa, Takahashi, pour ne citer qu'elles, à comparaître. Petit à petit je me fonds dans le paysage de la salle tout en priant de ne pas rester assez longtemps pour faire partie des meubles.


Mes oreilles sont à l'affût et mes jambes prêtent à bondir à l'appel de mon nom. Pourtant je ne bougerai pas un orteil en entendant la voix nasillarde annoncer « Kurununsu Yugeni Richeeeee » (J'vous la fais en français: "Clémence Eugénie Rigeeeer!"). Personne ne bouge. Normal avec un nom pareil, la nana n'a pas du comprendre un traître mot ! « Kurununsu Yugeniiii Richeeeeee » Et comme ici chacune se lève à peine l'appel terminé, tout le monde regarde dans la salle afin de voir qui est le gros boulet qui ose faire répéter le médecin. Bien sûr, les regards convergent tous à un moment donné sur moi. Moi-même je me regarde. Ça ne peut pas être moi... ? On dirait un nom russe... Cela dit ça ne sonne définitivement pas japonais et s'il y en a une ici qui n'est pas japonaise, c'est bien moi. Honteuse je me lève, toujours avec les pantoufles aux pieds, et tant pis pour mon intégrité.

*Idéogrammes japonais

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