01/07/2014

Une Tronculite sub-aiguë de la... quoi ??? (Part. III)

 « Kurununsu Yu... » Oui oui ça va, j'arrive ! Il est 11h28 et j'en suis à ce que je crois être l'étape finale. Entre temps on m'a fait passer une échographie (le corps et ses mystères...) où une infirmière m'a tartinée d'un gel translucide à l'odeur écœurante et tenace qui d'ailleurs me poursuivra quelques jours durant.

J'entre alors dans le cabinet, nimbée de ma frangrance by Play doh (mais si voyons, souvenez-vous : « La pâte à modeler, c'est plus rigolo avec Play doh »!!) et me trouve de nouveau face au visage fatigué du médecin pas mignon du tout.

Au sommet de Rishiri... Un autel!!!

Soudain, chose absurde me direz-vous, je regrette de ne pas avoir vu tous les épisodes de Grey's Anatomy en japonais... Car comme victime d'une incontinence verbale, le monsieur en blouse blanche se met à déblatérer toute une papardelle de termes médicaux, que même en français, et ben j'aurais rien compris. Je retiens simplement disease, vein trombosis et 心配じゃない (pas de souci). Voyant mes sourcils se froncer comme jamais, il me colle entre les mains en bredouillant quelques mots d'anglais, la copie de la page Wikipédia d'un sombre syndrome « inventé » par M. Henri Mondor.


Curieusement je pense à la chanson de C. François « Ça s'en va et ça revient » en lisant que l'anomalie part comme comme elle est arrivée. C'est-à-dire, comme ça, sans raison aucune. Le traitement ? Il n'y en a pas. Mais par contre, Riger San, vous seriez gentille de revenir dans trois mois afin de voir si tout va bien... Rassurée par le sourire ravagé (Rappelez-vous le bain de bouche à la soude...) mais naturel de mon médecin, je promets solennellement de lui rendre visite en Octobre. 
Il m'a rarement été donné de payer une facture médicale avec autant de gratitude et d'entrain. Comme une forte envie de mettre une grosse ambiance dans la salle d'attente à coup de Hiphiphip Hourra et "Tournez les serviettes". gaijin* dévergondée fasse danser sur les tables!

Cela dit les regards de chouette des autres patientes et la retenue ambiante calment mes ardeurs et je repars sans encombres. Manquerait plus que la

A noter pour la prochaine visite: Penser à ramener son propre pyjama...

*Terme un peu péjoratif pour désigner les étrangers.

23/06/2014

Une Tronculite sub-aiguë de la... quoi ??? (Part. II)

L'infirmière sourit trop pour être honnête mais elle veut sans doute être rassurante et c'est sympa de sa part. Nous entrons dans un vestiaire avec plein de pyjamas de toutes tailles et formes. J'ai beau vouloir faire un effort sur la longueur de ma colonne vertébrale, je ne peux tout de même pas m'enlever quelques vertèbres pour rentrer dans leurs vêtements. Déjà que ma réputation est sérieusement écornée avec cette histoire de haut-parleur, je ne vais pas en plus me balader avec une tunique en 14 ans !


Comment faire... Au bout de cinq minutes, la femme revient et, me découvrant en sous-vêtement, comprend qu'il va falloir trouver autre chose pour me vêtir. Elle cherche alors dans un placard affreusement pas rangé et en ressort une robe portefeuille à carreaux me rappelant la couverture de nos pique-niques familiaux dans les herbes de la Vallée des Merveilles. Trêve de nostalgie, nous avons déjà assez perdu de temps comme ça.
Enveloppée dans ma nappe, j'entre ensuite dans le premier cabinet pour m'entretenir avec l'infirmière. Seconde pensée chaleureuse pour l'investissement dans le dico électronique. Là, j'ai du montrer patte blanche et prouver que rien dans mes habitudes de vie ne justifiait ce que mon corps m'infligeait à l'heure actuelle. Non je ne fume pas, oui je bois du vin, je suis française et oui, c'est cliché. Régularité des cycles, dents de sagesse, quand, où, combien de temps , quand je dis quand c'est-à-dire quel jour, cancer dans votre famille....
Oui. Stop.
Vignes à Yoichi
Froncement de sourcils du personnel médical, rapidement effacé par un grand sourire toujours forcé, donc inquiétant. Mais c'est tellement sympa de sa part. Qui, où, quand ? Et alors que je m’attendais à devoir fournir le nom de jeune fille de ma mère et sa pointure, l'infirmière se lève et me conduit directement dans le cabinet du premier médecin.

Avoir un très beau docteur est toujours assez gênant, a fortiori lorsque celui-ci s'avère être votre gynéco ou dentiste. Et bien ici, aucun souci, je peux la jouer naturelle puisque le professionnel en charge de m'ausculter a l'air d'avoir eu le visage compressé entre deux portes d'ascenseur doublé d'un bain de bouche à la soude. Récapitulation du dossier, explications à base de jargon médical pas encore maîtrisé (pour ma part)...
Passons à table ! Je m'allonge et perds mon regard dans le vide loin, très loin pour faire place dans mon esprit. Penser à un truc cool...un truc beau... Arrivent dans mon champs de vision deux têtes d'infirmières, toujours souriantes. Ils sont alors trois au-dessus de l'objet d'étude.
Bon c'est bon, là ? Je vais pouvoir repartir ? Nooooon, nenni, Kurunsu !

Je vous passe l'heure et demie suivante rythmée principalement de fausses sessions de lecture (car impossible de me concentrer sur un magazine) pour me donner un soupçon de contenance. Seules viendront soulager mon impatience quelques visites éclairs intellectuellement éreintantes (car une expérience en salon d'esthétique m'apprendra que le doute sur le moindre terme peut avoir des répercussions désastreuses sur la suite des opérations).
Notons tout de même que bien qu'ayant un kimono d'hôpital totalement pas glamour, mes voisines me jettent des coup d’œils outrés.

Qu'ai-je encore fait... ?
Ne cherchez pas à comprendre.

Bien entraînée à l'appel improbable de mon nom, je suis sûre que ce n'est pas encore mon tour. Je me passe discrètement en revue, lorsque je m'aperçois que mon haut baille, laissant ainsi voir (et non entrevoir subtilement) l'objet de ma visite dans cette clinique. Ah tu n'as pas voulu t'habiller en 14 ans !? Très bien, tu auras un pyjama en …. XXL !
Oui, le seul capable de me vêtir décemment sans passer pour un personnage de hentai* cachait certes mon postérieur mais était beaucoup trop large ! Si bien qu'en m'asseyant,  les pans de tissu croisés s'affaissaient, découvrant ma gorge au grand jour (vous voyez le truc...?). Je tire dessus, me redresse... rien à faire, il me manque les épaulettes d'Albator pour rectifier tout ça. Tiens je vais aller me chercher un potage au maïs pour me détendre...

*Manga ou anime à caractère pornographique.

20/06/2014

Une Tronculite sub-aiguë de la... quoi ??? (Part. I)



          Mon corps a gentiment attendu que je sois bien loin de la France pour se déglinguer, au point de me faire franchir la porte d'une clinique japonaise pour y passer quelques examens. Si j'avais eu à subir cela en terrain connu et conquis dont je maîtrise parfaitement la langue, j'aurais déjà eu la frousse. Mais là, au Japon,  autant vous dire que je flippe à fond les binettes.

Descente de nagashi sômen
    J'entre donc à 09h08 dans un bâtiment tout blanc. Tout d'abord dès le premier tapis on vous demande de retirer vos chaussures (oui comme à la piscine) et de les déposer dans un casier numéroté. Je cherche mon chiffre porte-bonheur.... Zut il est déjà pris. Non pas que je sois superstitieuse, mais dans ces moments-là, mon cerveau est extrêmement perméable et je crois tout signe du destin, plus particulièrement lorsque celui-ci est de mauvaise augure.
J'arrive à l'accueil et présente ma carte de résidente (le sésame) et mon attestation d'assurance en tâchant de garder mon intégrité, droite dans mes savates en pilou d'un blanc immaculé.
 "-えええっとー…少々待ちください." (aloooors... Veuillez patienter un petit moment, svp)
Non. Pas encore. Surtout pas aujourd'hui...

Donc j'attends. On me fait asseoir. Au bout de dix minutes la secrétaire vient me

Le Monop' du coin...
voir et me fait comprendre avec force tournures alambiquées (parce que trèèès polie), qu'ils ne savent pas trop comment fonctionnent mon assurance, ma mutuelle, et surtout mon système de paiement. J'explique que je dois avancer l'argent puis me faire rembourser plus tard. Aucun problème, madame. Vous aurez votre argent aujourd'hui, en cash !
 Me revoici à l'accueil avec un superbe formulaire plein de kanji* à remplir. C'est là que je me dis que les 300 Euros que m'ont coûté mon dictionnaire électronique ont été l'investissement du siècle. Puis de nouveau « 少々待ちください».

Cela fait maintenant quinze minutes que je patiente devant un écran de télé. Les émissions japonaises sont pour moi (et pas que), un mystère. Pourquoi écrivent-ils toujours tout ce qu'il se dit à l'écran ? (Juste en passant, ils sont entrain de diffuser un concours de mangeurs de tartes à L.A. Précision : Les participants ont les mains attachées dans le dos. Ah, toutes mes excuses, ça vient de passer à un concours de culturisme féminin. Ah maintenant c'est la pub.)
J'ai la vague impression que je vais plutôt subir un lavage de cerveau au lieu d'une mammographie.

Les sièges autour de moi sont occupés par des postérieurs de mamies japonaises brushées, permanentées discutant à voix basse. Toutes ont déjà jeté au moins un coup d’œil à la gamine pas bridée qui parle en langage du cru avec les secrétaires médicales. Je me sens comme un clou qui dépasse, comme un peuplier au milieu d'une forêt de bouleaux,  Michael Jordan chez les Oompa Loompa. Bref je ne me sens pas très à mon aise.
Toutes les cinq minutes un haut-parleur appelle des madames Nakagawa, Takahashi, pour ne citer qu'elles, à comparaître. Petit à petit je me fonds dans le paysage de la salle tout en priant de ne pas rester assez longtemps pour faire partie des meubles.


Mes oreilles sont à l'affût et mes jambes prêtent à bondir à l'appel de mon nom. Pourtant je ne bougerai pas un orteil en entendant la voix nasillarde annoncer « Kurununsu Yugeni Richeeeee » (J'vous la fais en français: "Clémence Eugénie Rigeeeer!"). Personne ne bouge. Normal avec un nom pareil, la nana n'a pas du comprendre un traître mot ! « Kurununsu Yugeniiii Richeeeeee » Et comme ici chacune se lève à peine l'appel terminé, tout le monde regarde dans la salle afin de voir qui est le gros boulet qui ose faire répéter le médecin. Bien sûr, les regards convergent tous à un moment donné sur moi. Moi-même je me regarde. Ça ne peut pas être moi... ? On dirait un nom russe... Cela dit ça ne sonne définitivement pas japonais et s'il y en a une ici qui n'est pas japonaise, c'est bien moi. Honteuse je me lève, toujours avec les pantoufles aux pieds, et tant pis pour mon intégrité.

*Idéogrammes japonais

03/06/2014

Natation synchronisée aux portes de l'enfer (Part. II)



      A peine le ticket d'entrée payé, je remarque une chose : pas d'odeur de chlore à vous faire tomber le nez, et je dois déjà enlever mes chaussures. Une fois au vestiaire, je revis mes années de primaire. Adieu isoloirs où chacun dévoile sa nudité derrière de pudiques portes de cabines ! Ici, on peut discuter tranquille les seins à l'air avec la mamie qui squatte le casier voisin et s'essayer au séchage de cheveux naturiste.
Un coup d’œil dans le miroir pour un dernier check-up... Maillot, bonnet, lunettes de plongée...C'est bon j'ai le look.

Ayant laissé mes lunettes au casier, je me sens encore plus nue et vulnérable. Je tâtonne du regard les moindres recoins pour me diriger sans hésitation vers le bon endroit. Je trouve qu'il n'y a rien de pire que d'être perdue, au regard de tous, en bonnet de bain. Ainsi me voici dans le bassin, de l'eau jusqu'au menton, la ligne pour moi seule.
D'ailleurs, il est 18h30 et la piscine ne compte qu'une petite dizaine d'âmes. En France, je serais en pleine heure de pointe, à me prendre des coups de talons dans les côtes et me faire noyer par un rageux en brasse papillon.
Plus tard une de mes coloc' autochtone me dira avec un naturel déconcertant : « Bien sûr qu'il n'y a personne dans cette piscine ! Elle est construite sur un ancien cimetière ! Et attends de voir en Août que les portes de l'enfer s'ouvrent. Le bassin sera désert ! » Pour info, portes de l'enfer n'est pas le nom d'un bar, non, ce sont réellement les vraies portes de l'enfer * …

Pendant ce temps-là au centre-ville...

Je suis sur le qui-vive. A chaque fois qu'un surveillant s'approche du bassin, je m'arrête, le fixe de mes yeux plissés (oui, cela peut paraître hostile, mais c'est simplement pour mieux voir) et réalise qu'il ne se passera rien. Je suis une nageuse parmi d'autres et cela me réjouit.
Plus tard, quand l'hiver et le froid sibérien qui va avec se rapprocheront, et que même les kilomètres de brasse ne suffiront plus à me réchauffer, je passerai moins de temps dans le bassin pour m'adonner aux joies du... sauna.
Lieu de méditation/ stretching/ siestes et ronflements indécents... J'aurais pu rester des heures entières dans ce sauna en bois avec vue sur la piscine. Même sur les bancs bondés de japonais transpirants, je me sentais seule, dans mon cocon.
Parfois, le lundi plus précisément, on peut nager sur fond de musique classique et assister à l'entraînement de natation synchronisée. La première fois peut surprendre : On brasse tranquillement quand soudain il nous semble entendre quelques notes lyriques chaque fois que l'on ressort la tête de l'eau. « Mais oui, tout à fait.... C'est bien la musique du générique de Harry Potter, là ! »
 Et alors que notre crawl ramollissait et que nous envisagions une perspective de sauna imminente, voici qu'il nous vient un regain d'énergie, et boosté par ces soudaines envolées symphoniques, nous parvenons à tirer quelques longueurs de plus. Nager sur fond de « tadadadatadada.....doooum » est un tel plaisir que tous les mardis dans mon sac, le bentô côtoie le maillot de bain. Et si notre filet mignon (vous savez, ce muscle du bras communément appelé biceps!) commence à tirer et que la crampe pointe son nez, on peut toujours rester en marge, la tête sous l'eau pour observer les figures imposées des danseuses/nageuses.
20h15... Je sors du bassin tellement rafraîchie et revitalisée que j'en oublie parfois le sauna. La douche se fait avec le maillot de bain et l'eau passe du glacé au brûlant. Je n'ai d'ailleurs jamais su si c'était pour des questions de tonicité sanguine ou alors du à un simple dérèglement (ce qui me paraît tout de même bizarre dans un tel pays...).

Idée de sport sympa: La rando dans le brouillard**!

Dans le vestiaire des piscines japonaises existe une machine qui ferait le bonheur des télé-achats si elle était mieux exportée : L'essoreuse à maillot de bain.
Qui n'a pas eu le plaisir de retrouver son agenda trempé par un maillot imbibé de chlore parce qu'on avait encore oublié de prendre le sac à piscine ...? Avec cette mini machine à laver, on appuie 20 secondes sur le gros bouton jaune et zou. Ça tourne dedans, ça secoue dans tous les sens dans un boucan du diable, et nos affaires ressortent quasi sèches.

Le reste, vous connaissez. On s'habille, on se sèche les cheveux, on remet ses chaussures au dernier moment et on repart avec l'esprit bien plus léger, et Casse-Noisette dans la tête.

*Durant les festivités de O bon, les portes de l'enfer s'ouvrent pour permettre aux ancêtres de venir faire un tour du côté des vivants. Pour plus d'info: http://fr.wikipedia.org/wiki/O-Bon

** Pour plus d'info sur la rando de la mort dans le brouillard, jetez un œil là: http://gummysap.blogspot.fr/search?updated-max=2013-07-18T06:39:00-07:00&max-results=7&start=1&by-date=false

30/05/2014

Natation synchronisée aux portes de l'enfer (Part. I)



Tout d'abord j'ai questionné Tata B. (17 ans de Sapporo) sur l'affaire de la piscine au Japon.
J'avais en tête cette photo que l'on voit dans les manuels de géographie du lycée. Mais si, souvenez-vous ! Une piscine publique immense et colorée avec quinze asiatiques au mètre carré dans leurs maillots de bain multicolores.

Un peu dans ce genre-là, mais avec plus d'eau...
Dès lors j'ai toujours considéré ce lieu comme un gigantesque bouillon de culture où la perspective de faire deux brasses est aussi évidente qu'un tour de tandem sur le périph' à 18h. Pour insister un peu, je plaçais la piscine N°1 (devant la barre de métro) dans le top dix japonais des nids à cystites, gastro-entérites, encéphalites, gingivites (ça c'était pour la rime) et surtout mycoses.
Mais je m'égare.

J'interroge donc maintes fois ma collègue, l'air de rien :
« -Bah qu'est-ce que tu veux que je te dise ? C'est une piscine municipale, quoi ! »
Je ne sais pas pour vous. Mais pour moi qui n'ai fréquenté que les piscines de Paris (et ses abords), j'avais en comparaison directe la piscine du 15ème arrondissement avec son vieux carrelage orange et ses sèche-cheveux cassés.                                                   
J'insiste alors un peu :
« -Mais..euh... le bonnet de bain est obligatoire ? Et il faut des tongs en caoutchouc, aussi ?
-Le bonnet, oui bien sûr. Et les claquettes, c'est comme tu veux.
- Et il faut nager sans traîner et en gardant sa droite ?
-Ah ça oui. (Et là, je sens Tata s'emballer) Parce que si tu veux juste faire ta sirène avec une planche sous le menton, tu auras vite fait de te faire pousser des talons ! Souvent, enfin que dis-je, TOUJOURS il y a des mamies qui brassent à deux à l'heure et de front. Elles, tu as beau les éclabousser, leurs hurler des “失礼しまああああす”(Shitsurei shimasu*), elles ne te feront même pas le plaisir d'un coup d’œil courroucé. Elles t'ignoreront tout simplement. »
Ok, merci, ce sera tout pour aujourd'hui, je crois. Je récidiverai dans deux jours.

"-C'est un bar?" Non papy, c'est un sanctuaire. Ces gens prient...

La curiosité ayant pris le pas sur la patience, je décide de mettre mes heures de recherche de mémoire à profit et me rue sur Google pour en savoir plus. Combien y-a-t-il de piscines à Sapporo ? De quel genre ? Combien coûte l'entrée ? Etc.

Une fois tous les petits idéogrammes techniques décryptés, l'image de ce bassin de javel surpeuplé me semble être en réalité un joli mensonge. Encore un cliché bien exporté...
Après avoir épuisé toutes les excuses pour échapper au stress de la première fois (un peu comme avec le vélib parisien), je me retrouve au pied du mur et me rends à l'évidence que, oui il est temps de se jeter à l'eau (aha!) et d'aller voir cette fichue piscine.

Cinq minutes en vélo de chez moi + ouverte jusqu'à 23h= c'est parfait, ça !

Sur la route de Hakodate (Rien à voir avec le sujet...)

*Pardon, excusez-moi!

01/03/2014

Pourquoi faut-il mentir à la poste japonaise? (Part. II)



A la pointe de Rebun

 « -De quelle fleur sont les graines ? (je vous le fais en français directement.)
  -Pa...pardon ?
  -Ce sont les graines de quelle fleur ? » me demande-t-elle le plus sérieusement du monde. Son sourire ayant disparu, je me dis que l'heure est grave.
  Je bafouille que ce sont des graines achetées sur l'île de Rebun, et donc de fleurs assez rares. Mais je suis navrée mademoiselle, je ne connais pas le nom exacte.

 Froncement intense de sourcils. La queue de cheval ne va pas tarder à lâcher, je le sens.
Elle repart dans le fond du bureau, ouvre une porte dérobée (moment magique de l'histoire) et réapparaît cinq minutes plus tard. L'heure tourne, je recommence bientôt le boulot.

« -Excusez-nous pour ce dérangement, mais je voulais m'assurer que tout était en règle. Voici une lettre d'autorisation manuscrite de notre directeur général (et horticulteur par la même occasion) attestant que vos graines sont inoffensives. Quant aux mochi, vous n'avez qu'à les rayer de la liste et nous les passerons. Voilà cela vous fera 3700 yens.»
Classe, non ? J'aurais tellement aimé qu'il en soit ainsi.

Panel de fleurs de Rebun...

En réalité ce fut plutôt :
La demoiselle passe de mon côté du guichet et de suite je me dis que ce n'est pas bon.
« - Reconnaissez-vous la fleur ? » me dit-elle en me mettant sous les yeux deux pages pleines de photos de fleurs de l'île de Rebun. Il y en avait pour tous les goûts : violettes, roses, jaunes, belles, moches, déchiquetées, avec des feuilles, sans feuilles.... Et peut-être les miennes. Le souci est que je n'avais aucune idée ni du nom ni de l'allure de la fleur qu'allaient engendrer ces fichues graines ! Je les avais achetées dans une bicoque pleine de souvenirs et les avais emballées directement. La stupéfaction ne laissa pas de place à l'improvisation (oui, j'aurais très bien pu mentir!) et je perdis de mon amabilité.
« -Vous êtes sérieuse ?
   -Reconnaissez-vous la fleur parmi celles-ci ? Répète-t-elle, impassible. Je la soupçonne même d'avoir changé de coiffure pour se durcir les traits.
  -Non, je n'en sais rien. Et puis maintenant je n'ai plus le temps car je dois reprendre le travail. Merci, au revoir. »

Oui ça s'est finit ainsi. Je suis sortie sans me retourner, mon colis sous le bras. Nous nous sommes séparées après (je regarde l'heure) 45 minutes de conversation et d'échanges de regards, le tout sur une palette d'émotions variées.
Dehors j'ai quand même ri. Et le naturel français est revenu au galop : je l'enverrai depuis un autre bureau et je mentirai sur l'étiquette. C'est dit.


Toujours Rebun

24/02/2014

Pourquoi faut-il mentir à la poste japonaise? (Part. 1)

        
Étale de marché à Hakodate




 Deux mois. Deux mois pour choisir et rassembler ce que j'allais envoyer à ma famille en France. Les magasins japonais sont merveilleux mais peuvent se révéler être une torture pour quiconque veut envoyer un colis. Tout devient alors incontournable et fantastique. Dès lors, une fois la sélection drastique effectuée, je prends soin d'emballer toute la marchandise dans un carton lui-même momifié dans un demi-rouleau de chatterton gris.

Mais l'aventure commence ici. Et jusqu'à la fin de mon séjour je n'ai jamais pu arranger ma conscience pour passer outre cet événement fâcheux (bien que cocasse) comme je le fais habituellement. Peut-être que je juge trop durement l'employée du bureau de poste, frêle japonaise aux traits tirés par une queue de cheval lui donnant un air de surprise permanent. J'avais bien déjà remarqué sa réticence à me parler en japonais pour un envoi de recommandé :

« -フランスに書留手紙を送りたいんですが… (J'aimerais envoyer un recommandé en France svp)
 -???どこ? (De quoi, où?)
 -フランス。パリに送りたいんです。 (En France, à Paris.)
 -手紙?どんな手紙? A letter ?  (Une lettre ? De quel genre ? A letter?)
    -Oui, yes, そうです。書留。(Oui, yes, c'est ça. Une lettre en recommandé)
 -書留なに? (Une lettre, quoi?)
…. »    Finalement le message est passé, les termes étaient justes. Mais je n'ai jamais reçu l'accusé de réception.

Tout cela pour vous dire qu'avant de remettre les pied dans ce bureau, mon colis sous le bras, j'avais un mauvais pressentiment. Un truc du genre « Mais pourquoi une française veut envoyer un colis en France ? Pourquoi elle parle pas anglais comme tous les étrangers ? Est-ce qu'elle sait au moins ce qu'elle dit ?.... ». 
En allant à la poste...

Ainsi me voici au guichet, face à la même demoiselle que l'histoire du recommandé (petit détail : je n'ai jamais attendu à la poste au japon. Dès qu'un client entre, un employé se précipite derrière un guichet et vous fait signe.).
J'avais au préalable récupéré un document expliquant les différents modes d'envoi et renseigné sur la législation en matière d'exportation de produits à l' étranger. Avant Mars 2011, on pouvait presque tout envoyer du Japon. Aujourd'hui, je soupçonne La Poste française de passer les lettres et colis au compteur Geiger. Cependant aucune denrée de mon paquet ne figurait sur la liste des produits indésirables.
Je désigne alors sur le document quel genre d'envoi je désire, tout en agrémentant mes gestes de petits mots en japonais. La jeune femme me donne le formulaire adéquat sans questions ni froncements de sourcils (de toute façon sa queue de cheval lui annihile toute expression faciale).
Nom ; Adresse ; Numéro de téléphone... Le classique. Puis : Contenu du colis, nombre et prix de chaque article. Enfin, et c'est là qu'il faut avoir préparé son coup, la somme totale du contenu.
  mochi (petits gâteaux de riz gluant), graines de fleurs, album de coloriage... Ma pudeur m'obligeant à faire une petite exception pour la housse de cuvette de toilettes en moquette. Le tout écrit en japonais comme sur l'exemple.

Je reviens vers l'employée, le porte-monnaie à la main, prête à payer mon envoi et à partir. La jeune femme me demande dans sourire apparemment naturel (qui, réflexion faite, tenait plutôt du sadisme) de lui traduire le contenu du colis, histoire de vérifier si tout est licite.
BIEN SÛÛÛR, MADEMOISELLE !
Je reviens vers l'employée qui dès le premier coup d’œil me demande de le réécrire dans ma langue, en anglais. Je rectifie en lui disant que je suis française et que j'écrirai alors en français. Est-ce que ça ira, en français ?  « Oui, oui » me dit-elle d'un air mal assuré. Quelques minutes plus tard, je reviens au comptoir avec le formulaire bis. Non, apparemment ça ne va pas en français, il faut le
refaire en anglais. Je souris (en montrant peut-être un peu trop mes dents), reprends un formulaire entre mes doigts crispés et repars le remplir. 13H30. Cela fait déjà 20 minutes que je suis ici.
Comme une bonne citoyenne nippone, je joue cartes sur table et rapporte en détail tout ce que j'ai mis dans ce carton. A savoir : Auto-collants, papier à origami, gommes, bonbons,
Premières courses

Et comme dit mon grand-père devant Usual Suspect : « C'est là que l'histoire commence vraiment.» :
Je l'avais bien vue froncer subtilement ses sourcils en entendant mochi... Mais c'est à ”花種” (hanatane/graines de fleurs) que son sourire tombe. En un éclair elle tourne les talons et trottine, mon formulaire à la main vers une collègue à l'air très professionnel. Les deux discutent, ou plutôt chuchotent, leur main devant la bouche (oui comme quand on dit du mal de vous en face de vous sans que vous ne puissiez rien entendre) en me jetant des petits coup d’œil. Puis après un échange de regards interrogatifs, je les vois se diriger vers un autre collègue, et rebelote. Mêmes mains, mêmes regards interrogatifs mais avec une pointe d'inquiétude en plus. L'employée initiale revient vers moi, en me disant que les denrées alimentaires ne sont pas acceptées (adieu, mochi) et qu'il faut recommencer le paquetage.
Chouette.

Un bouquet nounours. Quand je vous dit que tout est fantastique!



La version supra-kawaï de la pomme d'amour:
                   La chocobanane!